La CAN, l’Afrique Subsaharienne et ses climatosceptiques

Dans la bouche d’un sportif, la défaite est toujours amère. Le moment parfait pour lui de faire une introspection en évitant de dépérir dans des excuses qui le feront passer pour un perdant déguisé.

Insolation

Faisant le bilan de sa CAN 2023, Walid Regragui s’en est pris au climat de la Côte d’Ivoire.

« Nous ne nous sommes pas bien adaptés à l’atmosphère et à l’humidité. On a débuté la préparation plus de dix jours avant le début de la compétition à San Pedro. Nous bénéficions des meilleures conditions qui soient. Il y avait des conditions climatiques très difficiles, mais on ne doit pas les prendre comme argument pour notre élimination », a lâché le sélectionneur Marocain quelques semaines après avoir déclaré qu’il démissionnerait si son équipe n’atteignait pas les demi-finales à Babi. Promesse qu’il n’a pas tenue, puisqu’il est resté pour s’en prendre au ciel dans un monologue déjà vu et entendu. Un coup de soleil on va dire…

Lorsque le demi-finaliste de la Coupe du Monde 2022 se voyait dans le dernier carré de la CAN 2023, il savait pertinemment où il allait poser ses crampons : qu’il pouvait gagner sous cette éclaircie. En Janvier en Afrique Subsaharienne, le climat est difficile pour tous ceux qui s’y trouvent. Même pour ses ressortissants, c’est compliqué de faire du sport sous cette météo. Raison pour laquelle des cooling breaks ont été imposés durant les rencontres, afin de faire souffler tout le monde. Pas uniquement les sélections Maghrébines.

Jusqu’ici la seule insolation officiellement constatée à une CAN, même si insolite, est celle d’un subsaharien : Janny Sikazwe lors de la rencontre Mali – Tunisie au Cameroun en 2022. Désormais à la retraite, l’arbitre Zambien avait alors créé un énorme tollé en sifflant deux fois la fin du match avant les 90 minutes.

Insolence

Le football de haut niveau se pratique sous la neige, la pluie et le soleil. Les périodes ensoleillées sont d’ailleurs les plus prisées pour les évènements de ce type. On évite juste les extrêmes.

Tacler le climat lorsqu’on perd, c’est donc se tromper d’adversaire. Il y a des étés pyromanes en Europe, mais un européen ne dira jamais qu’il a perdu l’Euro parce qu’il faisait trop chaud. Si les décideurs du football africain ont programmé des matchs à ces heures, c’est que tous les footballeurs n’y sont pas en danger. Lorsque le Brésil va en Bolivie, il se prépare à jouer en altitude.

En outre, derrière ce déni se cache un véritable manque de respect envers les habitants de cette zone. C’est comme dire qu’un être humain normalement constitué n’est pas capable de vivre là bas, quand certains grandissent dans le désert.

Un peuple c’est son climat. Reprocher à une personne son atmosphère, c’est douter de son droit d’exister. Le climat, on naît avec : on ne le change pas. Il impacte fortement et quotidiennement les habitudes alimentaires, vestimentaires et cognitives de ses populations. Un jour on dira aux subsahariens qu’ils ne peuvent pas organiser la CAN parce qu’il fait trop humide sur leurs toits.

Incongruités

Maghrébine, l’Égypte a remporté 3 de ses 7 CAN au Sud du Sahara : au Burkina Faso en 1998, au Ghana en 2008 et en Angola en 2010. La seule étoile du maillot des Lions de l’Atlas est originaire d’Éthiopie, le pays des hommes aux visages brûlés, en traduction…

En gros, le Maroc n’a jamais gagné dans son environnement le plus proche. Sur les 11 victoires de l’UNAF à la CAN, 4, à savoir presque la moitié, se sont faites en Afrique Subsaharienne. La thèse de l’exception est par conséquent inconcevable, sous ce climat que ses membres affrontent toutes les années durant les éliminatoires.

Indomptable

Ça commence comme un lézard pour finir en crocodile du Nil. Le Darwinisme est le roi de la mauvaise foi. En 2019 aux pieds des Pyramides, ON… avait accusé les Béninois d’avoir déplacé le poteau lorsque Ziyech avait loupé le penalty de la victoire, et participé à l’élimination des siens au second tour de la compétition. Et pourtant les Guépards, anciens Écureuils, pouvaient juste arrêter le temps et le rétablir une fois le trophée dans leurs mains, après avoir joué à 12 en finale, comme leurs voisins Ivoiriens :

« Oui, j’ai fait gagner la Côte d’Ivoire à 100%. Mon défunt grand-père Yao Benoît, chef, a joué le match avec les Éléphants. Que le gouvernement garde cette équipe, l’encadrement technique, les dirigeants de la FIF, ainsi que le ministre de tutelle », explique Aziz 47, féticheur Ivoirien reconnu, sur la chaîne NCI, selon des propos repris par le site yop.l-frii.com :

« Je dormais au cimetière à chaque match des Eléphants. Je peux confirmer que c’est grâce à moi que la Côte d’Ivoire a remporté la CAN 2023. Le bœuf que j’ai tué a permis à Sébastien Haller de courir à nouveau sur le terrain. »

Bref, les Chérifiens, chez les Pharaons, sortaient en huitièmes pour mieux faire au Cameroun, curieusement, où leurs locaux avaient remporté le CHAN haut la main en 2020. Ils étaient venus avec leurs infrastructures dans les valises pour repartir dès les quarts, les visages fermés, écartés par les Égyptiens après une rixe pharaonique dans les couloirs du Stade OMNISPORTS de Yaoundé. La capitale de ce pays que Djamel Belmadi voit dorénavant dans tous ses cauchemars.

Impasse

Quand le football veut te punir, il te met devant le fait accompli. À la CAN 2021, l’ancien sélectionneur Algérien a épuisé toutes les excuses possibles d’un pays Maghrébin qui perd en Afrique Subsaharienne.

C’étaient le soleil, l’humidité, la pelouse, le stade, les vestiaires, les hôtels, le COVID et finalement la sorcellerie qui avaient empêché les Guerriers du Désert de battre la Sierra Leone et la Guinée Équatoriale. Un Cameroun qu’ils devaient quitter bons derniers, pour le croiser à nouveau sur leur chemin. Stupéfaction ! Comment est-ce possible ? Le don d’ubiquité ? Les barrages…

Un but de Slimani, une victoire Algérienne à Japoma et le technicien célèbre son anniversaire en grande pompe. Tout redevient beau à Douala. On danse et trinque à l’avenir qui annonce le sourire malicieux sur le visage, une qualification logique à Blida, quand soudain…

Après le but de Toko Ekambi, c’est au sol et en larmes qu’on va retrouver Belmadi. On n’est plus au Cameroun, la crise sanitaire est finie, la pelouse est bonne, le climat est nickel, le soleil s’est couché, la lune s’est levée, il fait nuit, les étoiles brillent mais l’Algérie ne voit plus la sienne. Dans une enceinte où elle n’avait jamais perdu… qu’est ce qui s’est passé ? On les a chicotés !

Insoutenable

Pour les Algériens, la non-qualification pour le Mondial au Qatar a été vécue comme un séisme magnitude 9. Après avoir manifesté devant la FIFA, porté plainte, traité Eto’o de tous les noms pour sortir les Camerounais de la liste des 32, ils n’ont toujours pas oublié ce 29 Mars 2022.

Le choc terminé, on a encore eu droit à un chapelet de prétextes qui n’a pas réussi à exorciser le mal contenu par Djamel Belmadi. Arbitre de cet Algérie – Cameroun, M. Gassama et la CAF ont été lavés, séchés et parfaitement repassés par le principal responsable des échecs de l’équipe nationale Algérienne.

Après avoir accusé le monde entier, DB, Z à l’occasion, a installé un climat délétère dans son collectif. Benrahma en témoin, il s’est attaqué à ses propres joueurs, avant de rentrer en conflit avec sa fédération. Il faut dire qu’après deux éliminations successives au premier tour, sans gloire et sans victoires, lors de deux CAN à 24 où les quatre meilleurs troisièmes sont qualifiés, le réchauffement climatique devient un alibi un chouya ridicule.

Oui pour la deuxième étoile au palmarès, mais non ! La FAF est une institution sérieuse qui attend des résultats crédibles. Les Algériens n’avaleront pas des couleuvres tout le temps. Comme dirait Luis Fernandez : « le succès n’a pas besoin d’explication, l’échec n’admet pas de justification ».