BABIFOOT : 2 CAN, un vainqueur… le bilan.

La CAN 2023 est désormais terminée. L’heure est au bilan pour cette compétition à deux visages qui entrera dans les annales pour plusieurs raisons balancées entre les bonnes et les mauvaises.

La compétition

Sur le terrain, la CAN 2023 est un tube : le tube de l’hiver. Les 24 nations ont livré un spectacle exceptionnel qui aura du mal à être copié. Des surprises, du suspens, des buts, 118, un record : tout ce qu’on aime sur la cour du roi des sports. Un package couronné par le triomphe invraisemblable de la Côte d’Ivoire, troisième de son groupe après un premier tour catastrophique qui aura raison du sélectionneur Jean Louis Gasset, démissionnaire.

Cela étant, à côté du drapeau orange-blanc-vert, on a eu la chance d’apprécier les belles performances Mauritaniennes, Namibiennes, Angolaises, Capverdiennes, Sud-africaines et Congolaises de Kinshasa. Partitions qui nous ont fait oublier les éliminations précoces des Algériens, des Marocains et de tous les Mondialistes avant les quarts de finale. Top 8 intégralement différent de celui de la CAN 2022.

Les joueurs

Bien qu’elle fût privée de nombreuses stars, diminuées ou absentes, la CAN 2023 nous a fait découvrir ou redécouvrir de vrais gros talents africains. Aboubakar Vincent, Bryan Mbeumo, Amine Gouiri, Mbala Nzola, Lyle Foster, Mohamed Salah, Serhou Guirassy ou encore Victor Boniface n’étaient pas là, mais on ne s’est pas ennuyé.

À la place de cette constellation, on a eu droit à une galaxie. Mabululu, Fredy, Deon Hotto, Bébé, Ryan Mendes, Logan Costa, Sithole, Mudau, Percy Tau, Emilio Nsue, Mostafa Mohamed, Victor Osimhen, Nwabali, Troost-Ekong, Simon Adingra et autres Sébastien Haller ont parfaitement assuré l’intérim… Magistralement, ils ont démontré que l’Europe n’a pas le monopole du football de haut niveau.

En effet, on peut évoluer au Qatar, en Arabie Saoudite, en Afrique du Sud, en Égypte, aux États-Unis, sur d’autres continents, et être l’un des meilleurs au monde. Le soccer est universel.

Aux pieds comme avec ses mains, Ronwen Williams est bien plus fort qu’André Onana. Gelson Dala n’a rien à envier Lookman, Moses Simon ou Chukwueze. Mokoena est aussi percutant à la récupération que Sofyan Amrabat et Mudau un vrai danger sur son couloir droit. Lorsqu’on a vu les prestations d’Édouard Mendy, Sadio Mané, Nkoudou, Seko Fofana et surtout Franck Kessié, on peut d’ores et déjà être sûr que le championnat Saoudien n’est pas une maison de retraite.

Les entraîneurs

À cette CAN, il y a aussi eu le bal des entraîneurs. À l’image de Walid Regragui et Aliou Cissé, pour sa première expérience en Coupe d’Afrique, Rigobert Song s’est arrêté en huitièmes avec le Cameroun, éliminé par José Peseiro. Découvrant lui aussi cette fête, le Portugais à réussi à faire taire les critiques. Il a mené le Nigeria en finale où il est tombé sur Emerse Faé.

En remplacement de JLG, l’ancien milieu relayeur de l’OGC Nice, adjoint jusqu’ici, a changé le visage des Éléphants. Les menant vers le sacre, il a magnifiquement succédé à Yeo Martial en 1992 et Hervé Renard en 2015. Des noms aussi prestigieux que celui du Comorien Amir Abdou : le premier coach à qualifier la Mauritanie pour le second tour de la CAN. Exploit qui s’est écrit à la suite d’une victoire historique sur l’Algérie de Djamel Belmadi, sortie pour la seconde fois consécutive dès les poules, lanterne rouge, sans gagner.

En dehors de ces grands tacticiens, on citera bien évidemment aussi, Collin Benjamin, qui a qualifié la Namibie pour les huitièmes, Pedro Gonçalves de l’Angola, Bubista du Cap Vert, Sébastien Desabre de la RD Congo et Hugo Broos en Afrique du Sud. Le stratège Belge a fini troisième sur le banc des Bafana Bafana après avoir remporté l’or en 2017 à la tête des Lions Indomptables.

L’organisation

Si sur la pelouse on s’est indubitablement régalé, en dehors le fiasco a été consommé. On est très loin des Fake News qui ont terni l’image de la CAN 2022. Le ciel gris au-dessus de la cérémonie d’ouverture, fût le signe annonciateur d’une averse de couacs que les médias ont très peu couverts.

Il y a tout d’abord eu le récit glaçant de la délégation Gambienne, qui a failli vivre le pire dans un avion Air Ivoire, transporteur officiel de la CAN 2023, à cause d’une perte de pression et d’oxygène dans la cabine.

« Nous aurions tous pu être morts. Nous nous sommes tous endormis rapidement, moi y compris. J’ai fait de courts rêves sur la façon dont ma vie se déroulait, vraiment. Au bout de neuf minutes, le pilote a décidé de faire demi-tour car il n’y avait pas d’alimentation en oxygène. Certains joueurs ne se sont pas réveillés immédiatement après l’atterrissage. Nous avons failli être intoxiqués au monoxyde de carbone. Encore une demi-heure et nous serions tous morts », confiait le sélectionneur des Scorpions, Tom Saintfiet, soulagé. Des propos proches de ceux d’une victime du grave accident qui dans un convoi géré par le COCAN, a frappé un bus de journalistes :

« Nous allons rester jusqu’au soir [à l’hôpital de Treichville]. Pour nous c’est des blessures internes, nous avons passé des examens. Maintenant il y a d’autres qui sont blessés gravement, le sang a coulé, eux vont rester plus longtemps. D’autres ont eu leurs pieds coincés pendant des heures. Ça s’est passé à deux heures, les secours sont arrivés aux environs de quatre heures. Il y en a d’autres qui étaient coincés entre le mur et la voiture… Je panique ! Les pompiers sont arrivés mais n’avaient pas le bon matériel pour sortir les personnes bloquées. Certains ne pourront peut-être plus jamais marcher. Leurs genoux ont été gravement touchés. Chaque fois que je ferme les yeux j’ai l’impression de voir encore l’action, le bruit de l’accident, c’est traumatisant et ça va rester pour toujours dans ma tête », raconte Cheick Magassouba à Africa Top Sports, après avoir posté un appel à l’aide sur sa page Facebook.

En outre, l’affaire des tickets inexistants ou revendus à des prix exorbitants ne fût pas le seul bémol de cette fête. On notera également ce faible signal de transmission qui a conduit à une panne mondiale lors du derby Sénégambien, les fouilles un peu trop poussées sur les femmes à l’entrée des enceintes et l’attitude exécrable de nombreux supporters. Ces hooligans Ivoiriens qui ont intimidé les fans Camerounais, lancé des projectiles à leurs joueurs après leur succès devant la Gambie, hué leur hymne, sifflé la Zambie, qui ne leur a rien fait, et par dessus tout, déclenché des casses parce que leur pays a perdu. Jean Louis Gasset se souvient de ces moments difficiles qui ont précipité son départ :

« Après les 4-0 contre la Guinée Équatoriale, on était dans un vestiaire dévasté avec des affrontements à l’extérieur du stade.Je voyais les joueurs sur leurs portables pour prendre des nouvelles de leur famille. Ils avaient peur.Il ne faut plus jamais revivre ça ! »

« On était au bord d’une catastrophe, franchement. J’entraîne depuis 35 ans et c’est la première démission, mais vu ce qu’il se passait… Qu’on me dise que je suis nul, je suis vieux, tu n’a jamais entraîné en Afrique, d’accord, mais là, ça prenait une tournure dramatique. »

« Des gens allaient à notre hôtel, à la Fédération, il y’avait des pneus sur la route plus les policiers partout. Le Président Idriss Diallo recevait des appels du commissaire dans mon bureau au stade pour lui expliquer ce qu’il se passait dehors. »

« (…) Quand j’ai remis ma démission à Idriss Diallo, il m’a demandé une nuit de réflexion. Mais c’était la meilleure solution. Idriss Diallo est un type formidable, courageux. C’était la seule chose à faire pour sortir de ces ondes négatives. »

Autrement dit, on est très loin de la meilleure CAN de l’histoire. En 2014, le Brésil, à sa Coupe du Monde, s’est fait humilier à domicile par l’Allemagne et la Hollande, 7-1 et 3-0, mais personne n’a levé le petit doigt pour faire du mal à qui ou quoi que ce soit. Les Auriverde sont restés dignes, ils ont digéré leurs corrections et ils sont passés à autre chose. C’est aussi ça une grande nation de football…

Bravo à Faé ! Aujourd’hui il est un héros, mais qu’en sera-t-il lorsque ce ne sera plus le cas ? Quand Gasset gagnait, ils étaient tous contents. Dorénavant ils le vilipendent à tout va, sans se gêner, oubliant que sans sa victoire sur la Guinée Bissau, il n’y a pas de troisième étoile.

Jamais au 21e siècle, voire bien auparavant, une CAN n’aura été si électrique. Les clashs incessants entre communautés, une atmosphère délétère attisée par des chroniqueurs qui vont littéralement faire du Cameroun leur tête de Turc. Au point où certains spécialistes qualifieront l’équipe des quintuples champions d’Afrique de club de Ligue 2. Rancunières ? Des attaques infondées qui n’ont rien à voir avec du journalisme.

On est dans la partialité la plus vile. Celle-là même qui refusant d’évoquer la pelouse d’Ebimpe, désastreuse du premier au dernier jour, assimile Samuel Eto’o à une personne encombrante, quand c’est Didier Drogba qu’on voit tout le temps à l’écran. Même lorsque les siens ne jouent pas…

L’arbitrage

Dans l’ensemble l’arbitrage s’est montré à son avantage. Les seules fois où il n’a pas été à la hauteur d’un tel événement, c’était lors de la phase à éliminations directes, lorsque la Côte d’Ivoire jouait. Toutes les rencontres Ivoiriennes du second tour ont été émaillées par de graves erreurs arbitrales.

Lire aussi : CAN. Les arbitres de Côte d’Ivoire – Sénégal sanctionnés par la CAF ? (ouest-france.fr)

Contre le Sénégal, Nicolas Pépé cause le penalty de l’égalisation en étant hors jeu. Face au Mali, Sébastien Haller commet une faute sur sa déviation, avant le but du 1-1, et malheureusement pour la RD Congo, l’ouverture du score de Bakambu a été injustement refusée. Le ballon est entre les mains du gardien des Pachydermes mais il n’est clairement pas immobilisé. Une bourde de plus avant la catastrophe…

S’il y a un match où l’arbitrage a été pleinement en faveur du pays organisateur, c’est bien la finale. Il suffisait qu’un Ivoirien tombe pour que le sifflet déclenche l’alarme. En colère face à ce constat alarmant, Peseiro prendra un carton jaune. Un avertissement qui ne changera rien…

Avant que Kessié ne remette les pendules à l’heure, il y a une touche clairement Nigériane, une deuxième, qu’on a offerte aux Ivoiriens. Serge Aurier a coudé Zaidu en pleine course… il méritait le rouge, la VAR a fermé les yeux et son équipe est repartie avec la balle. Seko Fofana retombe sur la cheville d’Osimhen et l’arbitre ne lui donne rien. Yahia Fofana perd le temps, prend une biscotte, et dès que les sept minutes du temps additionnel se pointent, on siffle la fin de la rencontre. À quoi aura donc servi la sanction ? À brouiller les pistes ?

Conclusion

Sur le billard, la CAN 2023 sera restée mémorable. À l’extérieur, il y a eu trop de soucis pour qu’elle soit considérée comme une totale réussite. Sa bonne tenue semblait conditionnée par la victoire de la Côte d’Ivoire. Sans son public, les passe-droits du pays hôte, dans un autre contexte, en été, comment se comportera-t-elle au Maroc dans tout juste un an ?