Pep Guardiola : le séparatiste catalan à l’épreuve de l’Homme noir

Article : Pep Guardiola : le séparatiste catalan à l’épreuve de l’Homme noir
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27 décembre 2018

Pep Guardiola : le séparatiste catalan à l’épreuve de l’Homme noir

L’actualité en cette fin d’année c’est évidemment l’éviction de José Mourinho. Le double champion d’Europe a beau demander une pause pour sa famille et lui, le critiquer demeure une obsession pour nombre de médias. Paul Pogba a même été salué pour lui avoir adressé un message de « remerciement ». De qui se moque-t-on ? Le français a tout fait pour qu’on chasse le portugais et aujourd’hui il joue les compatissants… Trêve de pitreries ! Parlons de choses sérieuses. Parlons de la dernière sortie de Guardiola contre le racisme : « Mes enfants vont à l’école avec des Indiens, des noirs, des gens normaux de partout dans le monde… ». Est-ce à dire que les noirs, sans oublier les indiens, ne sont pas des gens normaux ?

Guardiola par Omnium Cultural – Image Flickr CC BY-SA 2.0

Intouchable

Le 8 Décembre 2018 lors de la défaite 2-0 de City à Stamford Bridge contre Chelsea, Raheem Sterling a été victime d’insultes racistes. Au cours de la traditionnelle conférence de presse d’avant match, son entraîneur a tenu à lui apporter son soutien avant d’affronter Hoffenheim en Ligue des Champions le lendemain. Un geste qu’il fit naturellement en prononçant les mots entre guillemets ci-dessus. Une phrase que le site Besoccer a tenu à ressortir pour certainement préserver son objectivité vis-à-vis d’une situation qui a suscité beaucoup d’émois, « l’émotion nègre, la raison hellène ». Le média sportif est d’ailleurs l’une des rares plateformes à avoir mis en avant ce qu’ils vont eux-mêmes appeler une « faute de communication ». C’est écrit en gras en bas à la fin de leur article « Mes enfants vont à l’école avec des Indiens, des noirs, des gens normaux… » : « Une phrase qui a fait le tour des réseaux sociaux, chacun peut interpréter comme ils le souhaitent, mais c’est surtout une faute de communication. » Il y’a donc manifestement un souci derrière leur conclusion de « décrasser » le discours du catalan en brandissant l’erreur comme raison. Et c’est là où le bât blesse…

Skitterphoto – Image Pixabay CC0

Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois. L’impartialité de Besoccer est à encenser. Le site porte bien son nom et son épilogue dans l’article en question n’est qu’un bref aperçu de la prise de position générale des médias sur Internet. Pour ces « partisans de l’erreur », la sortie de Pep en conférence de presse se résume à ce titre de RMC Sport : « Manchester City: « Il Faut Combattre Le Racisme », Lâche Guardiola Dans Une Belle Tirade ». L’hagiographie est en marche. Le technicien est médiatiquement peint comme un bel orateur malgré que son allocution contienne des fausses notes qui mériteraient bien d’être rapportées.

Les propos de la causerie qu’ils ont choisi de mettre en exergue sont les suivants : « Le problème, c’est que le racisme est partout, et pas seulement dans le football, malheureusement. Si ce n’était que dans le football, nous serions en sécurité. Mais le racisme est partout. On le voit avec ce qu’il se passe aujourd’hui avec les migrants, les réfugiés dans le monde entier, et la manière dont nous les traitons alors que nos grands-parents et nos arrières grands-parents étaient eux-mêmes des réfugiés. (…) Le racisme est omniprésent dans la société. Et c’est pourquoi il faut le combattre au quotidien. Il ne peut y avoir aucune tolérance à ce sujet. Il faut se battre. Pour les droits de l’homme, pour construire une meilleure société, pour notre futur » C’est clair et c’est net !

Guardiola par Milos Radovanovic – Image Flickr (Domaine Public)

C’est moi qui ai fait çaaa… ?

Nationaliste catalan, Pep sait de quoi il parle. De quoi, de qui, de lui ? Lui ce fils de cette Catalogne « victime d’un État qui a mis en place une persécution politique indigne d’une démocratie dans l’Europe du XXIe siècle » et « ambassadeur d’un séparatisme catalan radicalisé » ? « Nos grands-parents », « nos arrières grands-parents » : on dirait bien… Non ? Somme toute, chaque information doit être vérifiée pour être qualifiée de vraie. La piste du monologue n’est pas à exclure. « Dans la Catalogne indépendantiste, Pep Guardiola est un symbole ». Une représentation qui est loin de faire l’unanimité chez les footballeurs africains. Trois en particulier sur les cinq qu’il a entraînés avec Wilfried Bony et Riyad Mahrez, se sont totalement lâchés à son sujet.

Yaya Toure et Peter Vagenas par Marc W – Image Flickr CC BY 2.0

Yaya Touré : « Je ne sais pas pourquoi mais j’ai l’impression qu’il (Pep Guardiola) me jalousait, qu’il me prenait pour un rival. (…) Comme si je lui faisais un peu d’ombre. Il était cruel avec moi. Vous croyez vraiment que Barcelone aurait pu faire ça avec Iniesta ? J’en suis arrivé à me demander si ce n’était pas à cause de ma couleur. » L’intéressé niera les faits et rétorquera au micro de la télévision catalane TV3 en disant : « C’est un mensonge et il le sait. On a été ensemble pendant deux ans et c’est maintenant qu’il dit ça. Il ne me l’a jamais dit en face. »

FC Barcelona – Bayer 04 Leverkusen, 1/8 Final UEFA Champions League, Season 2011/2012 par Shai Pal – Wikimedia Commons CC-BY-SA

Et Seydou Keita alors… : « J’ai entendu de nombreuses fois Guardiola dire qu’il m’appréciait beaucoup dans la presse. Comme il disait du bien de moi, je pensais que tout allait bien mais ensuite je ne jouais pas. J’aurai préféré qu’il ne fasse pas ces éloges. C’était un procédé hypocrite et je lui ai dit ce que j’en pensais en face. » Nous sommes six ans avant en 2012 et Guardiola n’a toujours pas répondu à ce « Touré » qui lui a dit ce qu’il pensait « en face ».

Samuel Eto’o par Mustapha Ennaimi – Image Flickr CC BY 2.0

Et que dire du cas Samuel Eto’o ce 23 Mars 2014 avant le Clasico. Invité du « Club du Dimanche » sur Bein Sport, devant un Jean Alain Boumsong « admiratif » et des Jean-Pierre Papin et Luis Fernandez enjoués, le lion rugit. Le camerounais performe sur un rythme ici saccadé : « Non seulement il se trompe, mais il se trompe profondément. (…) Ce qui me fait encore plus mal, c’est qu’ils inventaient des choses que la presse relayait. (…) Je lui ai dit : “Celui qui va te faire gagner c’est Eto’o. Et tu viendras me demander pardon.” Et je suis resté à ma place. (…) Et comme il n’a jamais eu le courage de me dire les choses en face, il est passé par mes coéquipiers. (…) Moi je ne parle pas à Pep parce qu’il m’a manqué de respect ouvertement à plusieurs reprises. (…) J’ai parlé deux fois à Pep. Une fois c’est parce qu’il me demandait d’aller parler à Yaya Touré qui ne voulait rien savoir de lui. Et une autre fois lorsqu’il voulait me donner des leçons sur comment un attaquant devait bouger. Je lui ai dit : “mais Pep, tu as été milieu de terrain. T’a pas été un grand attaquant“ (…) La vraie histoire c’est celle-là (…).» Cette « Interview hallucinante de Samuel Eto’o sur Guardiola » a généré plus de 4 millions de vues sur Youtube et il y’a encore de la place.

Le Camp Nou par Kieran Lynam – Image Flickr CC BY 2.0

Césaire et ces airs de César

Trois joueurs noirs pour trois plaintes, la triangulation n’a-t-elle pas fait le plein ? Trois joueurs africains parmi les plus célèbres de l’histoire du football qui s’additionnent à Zlatan Ibrahimovic pour ajouter à ce trigone un quatrième côté. Mino Raiola l’agent du suédois est même allé jusqu’à traiter Pep de « chien ». Et celui-ci de répondre : « Il doit respecter les chiens ». « Et les chiens se taisent », comme dirait Aimé Césaire…

Sasint – Image Pixabay CC0

Le terrain de jeu indépendamment du sport est le seul endroit sur Terre où on n’a pas pu écrire « Whites Men Only » ou d’autres déraisons dans ce genre. Lorsque nous nous asseyons pour regarder un match de foot, c’est pour prendre la vie du bon côté et la transmettre à nos enfants. On n’a que 90 minutes pour oublier à notre manière toutes les injustices qui divisent la société. La balle rapproche les peuples, les met sur un même pied d’égalité et chaque média devrait participer à ce succès. Cependant ce n’est toujours pas le cas. Les différences de traitement dans les informations perdurent. Et si c’était même pour les bonnes raisons…

Ouest France affirme dans son article « Manchester City. Guardiola soutient Sterling, victime d’insultes racistes » : « Sur son compte Instagram, Sterling avait accusé certains journaux britanniques, dont le Daily Mail, « d’alimenter le racisme » par leur manière de parler des footballeurs noirs. La star de la Premier League a reçu le soutien de l’Association anglaise des footballeurs professionnels (PFA) qui a souligné que Sterling est « souvent mis en avant et traité plus durement que ses collègues ». Et elle juge que « ces articles alimentent le racisme dans le football, comme le montre la hausse continue des incidents racistes ». » Que dire… ?

Freeillustrated – Image Pixabay CC0

Lorsqu’il s’agit de descendre Mourinho, les idées se bousculent sur la pointe du stylo comme encre qui coule. Sauf que jamais derrière lui, le lusophone n’a laissé de telles déclarations. Comme tout entraîneur, il a eu des dissensions vives avec des joueurs mais ce n’est aucunement allé si loin. Très souvent ce sont même des mercis qui retentissent dans son dos. Le jour où il commettra ce genre de « faute de communication » on ne le ratera pas, c’est certain. Ses victoires suscitent déjà des critiques, combien de fois ses défaites ? On a même créé cet arbitraire théorème des trois années pour mieux dézinguer sa méthode. Heureusement qu’il en fait trois dans ce monde où tu peux rester quelques mois… Ils entendent les bruits de couloirs, mais pas les cris sur la place publique. Personne ne se penche sur le cas de ces footballeurs noirs (et pas que) qui se plaignent depuis bientôt dix ans d’un nationaliste adulé pour son jeu… quand on sait que l’une des résultantes mêmes du racisme c’est l’iniquité dans le traitement. Quoiqu’à quoi bon geindre ? Le racisme est un état d’esprit, pas une maladie…

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